Pierre Laplane, directeur général des services de la ville et de
l’eurométropole de Strasbourg, était le président du jury du concours
d’administrateur de cette année. Il dresse pour La Gazette un bilan de
la nouvelle promotion, et de son expérience, agrémentés de conseils pour
les futurs administrateurs.
Quel est le bilan du concours d’administrateur, à l’issue duquel 51 candidats ont été retenus, pour 60 postes ouverts ?
Le bilan est quelque peu différencié. Nous avons utilisé la
possibilité de préempter une partie des places du concours externe pour
augmenter le nombre de lauréats du concours interne. Ce qui a pu être
fait en préservant le niveau de reçus du concours externe au même niveau
que la promotion précédente, pour laquelle le jury n’avait pas eu
recours à cette option.
Le niveau, la motivation ainsi que la préparation des candidats du
concours interne nous ont beaucoup satisfaits. Le nombre de
fonctionnaires d’Etat, comme l’an dernier, est notable. Ces candidats
n’ont pas forcément une grande connaissance du monde territorial mais
ils nous ont, pour beaucoup, montré une vraie motivation.
Cinq personnes ont été reçues dans la catégorie de la troisième voie.
Globalement, le bilan est là encore satisfaisant. On note comme l’an
dernier une certaine diversité.
Le bilan est en revanche plus contrasté pour le concours externe. Des
membres du jury ont exprimé leur déception quant au niveau des
candidats, même si certains sont très bons. Un certain nombre d’entre
eux s’étaient très peu documentés sur la FPT, ses spécificités, les
relations aux élus et aux territoires. Ils nous ont montré qu’ils
n’avaient pas assez réfléchi, pris contact avec des administrateurs
territoriaux, etc.
Mais, au total, la moyenne générale du dernier reçu reste
sensiblement similaire à celle du dernier reçu de la promotion
précédente. Nous n’avons pas fait preuve d’un excès de sévérité.
Evidemment, nous avons aussi eu en tête le contexte plus contraint
pour les collectivités, et une période sans doute plus difficile pour le
recrutement. Nous avons pensé également aux changements que devraient
connaître à moyen terme les collectivités, l’adaptation de leur
organisation, la prise en compte du contexte financier, l’absence
probable de remplacement de tous les administrateurs qui vont partir à
la retraite, etc. En tant que membres du jury, la question de
l’employabilité nous a habités, évidemment.
Nous
avons aussi eu en tête le contexte plus contraint pour les
collectivités, et une période sans doute plus difficile pour le
recrutement.
Avez-vous tenu compte également du cas des candidats reçus l’année dernière qui n’ont toujours pas trouvé de poste ?
Nous y avons pensé, mais sans faire montre d’une sévérité accrue.
Pour la promotion Simone-de-Beauvoir déjà, le nombre total de places
n’avait pas été attribué. Avec 60 postes ouverts, il peut être tentant
de laisser leur chance à des candidats ne présentant pas un niveau de
maturité ou de préparation suffisant, mais est-ce leur rendre service
s’ils rencontrent par la suite des difficultés ?
Quel bilan tirez-vous de l’épreuve de « mise en situation professionnelle » du grand oral ?
Cette épreuve vise à déceler les capacités de réaction, le sens
pratique, les capacités à prendre des responsabilités, c’est-à-dire à
analyser une situation et à avoir les bons réflexes, même s’il est
évident qu’on les acquiert aussi avec l’expérience. Bien sûr, cette
partie du concours peut être vécue de manière différente par les
candidats du concours interne, qui ont pu déjà expérimenter les
situations sur lesquelles nous souhaitons voir comment les candidats
réagissent.
Quelles qualités l’administrateur de demain doit-il posséder ?
Il doit savoir développer une stratégie, pouvoir avoir une réflexion
d’ensemble sur un sujet, travers les voies et moyens pour y parvenir. Il
est nécessaire d’avoir une vision en somme, mais aussi évidemment un
sens pratique. En bref, il faut savoir se projeter vers l’avenir et
répondre au temps présent.
Les relations avec les élus revêtent aussi un caractère important. Un
fonctionnaire territorial doit pouvoir s’épanouir professionnellement
dans un partage de responsabilité avec les élus qu’il faut respecter,
mais devant lesquels il s’agit aussi de montrer une capacité à défendre
un point de vue, à prendre toute sa part au processus décisionnel.
Un administrateur doit, en outre, savoir mener des équipes,
c’est-à-dire avoir un bon rapport aux autres, être dans une relation de
confiance avec eux. La dimension humaine est un élément important qu’il
faut pouvoir traduire dans ses postures professionnelles.
Enfin, la question de la résistance au stress n’est pas négligeable.
Durant le grand oral, certains candidats ont montré une émotion devant
les huit membres du jury, ce qui est normal, mais il faut savoir la
maîtriser, s’en libérer. Dans une situation professionnelle quelle
qu’elle soit, l’administrateur peut être confronté à des relations
difficiles avec des élus, des collaborateurs, etc.
Un
administrateur doit savoir mener des équipes, c’est-à-dire avoir un bon
rapport aux autres, être dans une relation de confiance avec eux.
A titre personnel, pourquoi avez-vous accepté d’être président du jury ?
Cette expérience a été extrêmement vivifiante et riche. Cela permet
de poser un regard sur sa profession, ses responsabilités, le service
public, la manière dont ce dernier est rendu, etc. Ma carrière est déjà
bien avancée ; il y a une sorte de témoin à passer. Une nouvelle
génération donnera sa couleur. Mais dans le même temps, il est important
qu’elle se nourrisse de l’histoire de ce cadre d’emplois et de la
fonction publique territoriale. J’ai mesuré la responsabilité d’une
telle mission, mais ce qui est important, comme dans toute prise de
responsabilité, c’est qu’on n’est pas seul pour l’assumer !
Poser un regard sur sa profession, ses responsabilités, le service public, la manière dont ce dernier est rendu, etc.
Source:
lagazettedescommunes.com