mardi 12 avril 2011

La reconnaissance, dans un autre État membre de l'UE, des qualifications professionnelles

La directive sur la reconnaissance des diplômes prévoit deux mécanismes de reconnaissance des diplômes, différents selon que le demandeur possède un diplôme délivré par un État membre qui réglemente cette profession, ou que le demandeur a exercé la profession à plein temps pendant au moins deux années dans un État membre qui ne la réglemente pas.

Si en Grèce, la profession d’ingénieur en environnement est réglementée par l'État, elle ne l’est pas au Royaume-Uni. Son exercice y est réglementé dans une certaine mesure par l’Engineering Council (organisation privée mentionnée expressément par la directive 89/48). La qualité de membre de cette organisation n'est pas obligatoire pour exercer la profession d'ingénieur.

Mme Christina Toki, ressortissante grecque, a obtenu au Royaume-Uni les titres de « Bachelor of Engineering » et de « Master of Science » dans le domaine de l’ingénierie environnementale à la fin des années 90. De 1999 à 2002, elle a travaillé pour l’université de Portsmouth, au département d’ingénierie civile. Ses activités comprenaient la recherche, l'assistance aux étudiants, ainsi que l’évaluation de l’efficacité d’une méthode innovante de traitement des déchets en collaboration avec une entreprise privée spécialisée dans ce domaine.

Elle a ensuite demandé que lui soit reconnu en Grèce le droit d’y exercer la profession d'ingénieur en environnement, sur la base des qualifications et de l’expérience acquises au Royaume-Uni. Sa demande a été rejetée en 2005 par le Conseil chargé de la reconnaissance de l’équivalence professionnelle des titres d’études supérieures, au motif qu'elle n'était pas membre à part entière de l’Engineering Council et ne possédait par conséquent pas le titre de « Chartered Engineer ».

Mme Toki a attaqué cette décision devant le Conseil d'État (Grèce), qui demande à la Cour de justice de préciser les conditions établies par le système général de reconnaissance des diplômes lorsqu’il s'agit d'une profession réglementée par une organisation privée telle que l’Engineering Council, et que le demandeur n’en est pas membre à part entière.

La Cour note, tout d'abord, que la loi grecque transposant la directive a pour effet d'exclure l’application du mécanisme de reconnaissance fondé sur l'expérience professionnelle, lorsque l’intéressé a acquis sa formation dans un État membre où l'exercice de la profession est réglementé non pas par l’État membre lui-même, mais par des organisations privées reconnues par cet État membre.

Or, pour les professions en cause, la Cour constate que seul, le mécanisme de reconnaissance qui présuppose l’exercice à plein temps pendant au moins deux années de la profession est applicable. Ce mécanisme de reconnaissance est applicableindépendamment du point de savoir si l’intéressé est membre, ou non, de l’organisation concernée.

Premièrement, l'expérience professionnelle doit consister en un travail à temps plein pendant au moins deux ans au cours des dix années précédentes. Ce critère assure à l’État d’accueil des garanties semblables à celles existantes lorsque la profession est réglementée par l’État membre d’origine. Le contexte, organisationnel ou statutaire, ou le but, lucratif ou non, de l’organisme dans lequel la profession a été exercée n'est pas un facteur pertinent. Il en est de même concernant la profession qu'elle ait été exercée à titre indépendant ou en tant que salarié.

Deuxièmement, le travail doit avoir consisté en l’exercice constant et régulier d’un ensemble d’activités qui caractérisent la profession dans l’État membre d’origine. Il n‘est pas nécessaire qu'il couvre la totalité des activités qui caractérisent la profession. L'appréciation des activités relevant d’une profession déterminée est une question de fait devant être tranchée par les autorités de l’État membre d’accueil, sous le contrôle des juridictions nationales. Si dans l’État membre d’origine la profession n’est pas réglementée, il faudra se référer aux activités professionnelles normalement exercées par les membres de cette profession dans ce même État membre.

Troisièmement, la profession, telle que normalement exercée dans l’État membre d’origine, doit être équivalente, en ce qui concerne les activités qu’elle recouvre, à celle que l'on souhaite exercer dans l’État membre d’accueil. La directive vise des professions qui, dans l’État membre d’origine et dans celui d’accueil, sont identiques ou analogues, ou dans certains cas, simplement équivalentes par rapport aux activités qu’elles recouvrent.

La Cour estime que les activités exercées par Mme Toki, telles que la recherche où l’assistance aux étudiants ne constituent pas un exercice effectif de la profession d’ingénieur en environnement : il ne s'agit donc pas d'une expérience professionnelle devant être prise en compte pour la reconnaissance en Grèce des qualifications britanniques. En revanche, les travaux d'évaluation menés en coopération avec une société privée spécialisée dans les technologies du traitement des déchets liquides pourraient constituer un exercice effectif de la profession en question. S’il devait être établi que Mme Toki a exercé de manière effective la profession d’ingénieur en environnement au Royaume-Uni, il conviendrait ensuite de déterminer si celle-ci constitue la même profession que celle qu'elle a demandé d'exercer en Grèce. Les autorités compétentes de l’État membre d’accueil devront vérifier ces éléments de fait.

Pour en savoir plus : www.ec.europa.eu

Source: secteurpublic.fr

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