jeudi 14 avril 2011

Le CNFPT va-t-il devoir baisser les cotisations des collectivités ?

Une baisse de 10% des cotisations des collectivités pour le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). C'est ce que suggérait il y a à peine plus d'un mois la Cour des comptes dans son rapport public annuel. Favorable à cette idée, le président de la commission des finances du Sénat, Jean Arthuis, souhaite qu'elle soit mise en oeuvre rapidement.

François Deluga, le président du CNFPT, a sans doute vécu ce 23 mars un bien mauvais moment. Auditionné par les sénateurs de la commission des finances, il a dû répondre aux sévères observations du dernier rapport annuel de la Cour des comptes, qui ont valu à l'organisme un "carton rouge". Le gendarme du secteur public n'était pas tendre, pointant en particulier une adaptation trop lente de l'établissement au nouveau contexte juridique, une "gestion peu rigoureuse", la "persistance de graves anomalies de gestion", les "défaillances" des politiques des ressources humaines et des achats, l'absence d'un service d'audit interne, la survenue de "graves malversations" dans une délégation du Sud de la France... Pour la Cour, cela ne fait aucun doute : le "laxisme de la gestion" a été favorisé par "l'abondance des ressources" dont a bénéficié le CNFPT. De 2004 à 2007, le produit des cotisations que celui-ci a encaissées a augmenté de 40%. Soit plus vite que le nombre des journées de "formation stagiaire" qui, lui, s'est accru sur la même période de 24%. De cet écart a résulté une accumulation des excédents, atteignant 113,4 millions d'euros, fin 2009. Une "cagnotte" qui, dès fin 2010, a cependant fondu de moitié du fait de l'acquisition du nouveau siège.
Le juge financier en déduit que le législateur peut réduire de 10% la cotisation due par les collectivités locales, afin de dégager une économie d'environ 32 millions d'euros par an. Pour le ministère du Budget, chargé de tenir le cap de la réduction des déficits, cette proposition vient à point nommé. De même que pour le président de la commission des finances du Sénat, Jean Arthuis : "Il ne serait pas inconvenant que durant un certain temps, le taux de cotisation soit ramené à 0,9%", a conclu le sénateur ce 23 mars, en indiquant que personnellement, il jugeait le taux de 0,8% "plus approprié".
Vers des années de vaches maigres

Jean Arthuis souhaite que la mesure soit prise en "loi de finances rectificative" - une échéance rapprochée, sachant que le prochain collectif budgétaire sera présenté a priori mi-mai en Conseil des ministres. "Notre problème est de faire fondre un déficit", a-t-il expliqué. "Il est moins difficile de faire fondre un excédent que de faire fondre un déficit. Nous avons tous le devoir de maîtrise des dépenses publiques", a poursuivi Jean Arthuis.
Le sénateur et président du conseil général de la Mayenne a aussi pris la défense des maires soucieux d'une gestion rigoureuse des finances communales. Daniel Leroy, élu local et président du centre de gestion de Seine-et-Marne, qui représentait l'Association des maires de France (AMF), s'est placé sur un autre terrain : "A aucun moment nous n'avons eu à l'esprit une baisse de la cotisation", a-t-il déclaré en rendant compte des "récentes discussions" qu'ont eues les membres du groupe de travail de l'AMF consacré à la fonction publique territoriale, tout en précisant que celles-ci ne peuvent en aucun cas tenir lieu de position officielle de l'association.
François Deluga a tenu à montrer que sur les années 2009 et 2010, le tableau est très différent de celui que décrit la Cour. Le nombre des journées de formation s'est envolé de 27% avec une progression du produit de la cotisation beaucoup plus limitée (7%) et qui s'annonce encore moindre au cours des prochaines années. Pour 2011, le CNFPT s'attend en effet à une croissance du produit des cotisations comprise entre 1 et 1,5%. Pour les années qui viennent, il table même sur une baisse. La progression ralentie des effectifs des collectivités et le remplacement des agents partant en retraite par des jeunes moins bien rémunérés vont en effet immanquablement peser sur la masse salariale des collectivités, qui sert d'assiette aux cotisations dévolues au CNFPT.
"Former les agents dans les collèges ou les lycées"

Dans le même temps, la demande de formations risque d'exploser. Confrontées à des difficultés financières, les grandes collectivités vont faire des économies sur les formations qu'elles commandent aux organismes du secteur privé et solliciter davantage le CNFPT. Une réduction de 10% de la cotisation accentuerait donc "l'effet de ciseau" qui va immanquablement se produire, a analysé François Deluga. Le fonds de roulement serait épuisé en deux ans. Ensuite, le centre n'aurait pas d'autre choix que de "réduire de 20%" le volume de ses formations, a-t-il expliqué. En indiquant que de surcroît, si les collectivités consacrent obligatoirement 1% des salaires à la formation de leurs agents, les entreprises privées font un effort bien supérieur.
"On a un certain temps avant de voir la situation financière [du CNFPT] réellement se dégrader. Il y a un geste à faire", a réagi Philippe Dallier, sénateur de Seine-Saint-Denis. François Deluga a rappelé que l'analyse faite par la Cour porte principalement sur la période allant de 2004 à 2008, sachant qu'il a été élu à la tête de l'établissement en 2009. Et qu'il a dès lors préparé avec ses services et les élus un vaste plan national de développement, adopté en septembre 2010 (lire ci-contre notre article du 17 septembre 2010), qui traduit de nombreuses préconisations faites par la Cour. François Deluga a indiqué que sa mise en oeuvre nécessitera trois ans.
Pour que le CNFPT parvienne à des économies, le président de la commission des finances a suggéré que les formations se déroulent... "dans des collèges ou des lycées". Une fausse bonne idée, sauf à obliger les agents à aller en formation uniquement le mercredi ou le samedi, a rétorqué le président du CNFPT, qui a par ailleurs rappelé le nombre considérable de journées ou heures de formation organisées par son établissement organise. En 2008, pas moins de 11,6 millions d'heures de formation ont été dispensées par le CNFPT.

Thomas Beurey / Projets publics

Source: localtis.info

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